Une société de plus en plus autoritaire, la fascisation en marche

Les dernières semaines montrent l’accélération d’une fuite en avant autoritaire du gouvernement. On ne parle pas d’un fascisme au bruit des bottes mais plutôt d’un soft-fascisme au bruit des pantoufles.

« La dictature peut s’installer sans bruit. » (G.Orwell)

C’est en pleine crise sociale et sanitaire que le gouvernement Macron-Darmanin entreprend de faire passer des lois qui, non contentes de précariser davantage celles et ceux qui l’étaient déjà, portent gravement atteinte à nos libertés fondamentales, individuelles et collectives. 

Des lois liberticides

Pour ceux et celles qui ne rentreraient pas dans les rangs de La République En Marche, Darmanin et Macron renforcent les lois liberticides déjà en place.  Avec la loi sécurité globale, votée à l’Assemblée le mardi 23 novembre dernier, le gouvernement tient une des promesses qu’il avait en commun avec le Rassemblement National, tout en allant dans le sens des syndicats policiers d’extrême-droite : accentuer la protection des forces de l’ordre. Le texte prévoyait notamment d’interdire la diffusion d’images et vidéos de policiers mais face à la pression de la rue de ces derniers jours, on observe un léger rétropédalage. 

Pour autant, la loi dans son intégralité doit être retirée car les autres articles autoriseraient pêle-mêle : le recours aux drones, aux caméras-piétons, à la reconnaissance faciale dans l’espace public. Cela induit donc un contrôle et une surveillance accrue des manifestations. Elle permettrait également l’élargissement des pouvoirs de la police municipale, l’accès aux lieux publics pour des policiers armés en dehors de leur service et la privatisation progressive de la police. En effet, la proposition de loi fait monter en première ligne la sécurité privée dont les agents pourront être associés aux opérations de palpation de sécurité. Cette attention toute particulière aux « droits » et à la protection des forces de l’ordre ne date pas d’hier. On se souvient notamment de l’autorisation de 2015 donnant le droit aux policiers de garder leurs armes en dehors de leur service, ou encore, en 2016, de la banalisation de l’usage de ces mêmes armes par les policiers en cas de légitime défense. Mesures qui ont sans surprise engendré plusieurs meurtres et « bavures ». Des mesures prises dans l’urgence et dans l’émotion des attentats de 2015, tout comme les lois scélérates votées au début du siècle dernier. L’urgence et l’émotion ont toujours favorisé une atteinte aux libertés. L’ordre et la sécurité en échange de nos libertés. 

De plus, avec cette loi le gouvernement s’en prend frontalement à une de nos libertés essentielles qui est celle d’informer. En effet, le seul soupçon « d’intention malveillante » de la part de celui ou celle qui filme, suffit à être puni. Cet article est une atteinte non seulement aux journalistes et à la liberté de la presse, mais également un énième coup porté au droit de manifester. Mais nous n’en sommes pas à la première loi qui va dans ce sens. On se rappelle des lois anti-casseurs qui condamnent toute personne dissimulant son visage, permettent l’assignation à résidence, interdisent de manifestation des militant-e-s et journalistes et enfin qui généralisent la fouille des manifestant-e-s aux abords des rassemblements. À cela s’ajoute ainsi la loi sur la surveillance comme si les lois de l’État d’Urgence passées dans le droit commun ne suffisaient pas, quand l’exception devient la règle, encore. 

La nouvelle loi sécurité globale veut elle, accentuer la surveillance des manifestant-e-s car depuis quelques années l’état répond à la crise sociale et économique par une répression de plus en plus forte des mouvements sociaux et la restriction des libertés.

Des boucs-émissaires pour mieux cacher la misère

L’Histoire regorge d’exemples, c’est une vieille habitude, à chaque période de crispation sociale et économique l’état désigne des ennemis. À la faveur du contexte ils revêtent différents costumes : les juifs, les francs-maçons, les plombiers polonais (travailleurs détachés), les syndicalistes, les jeunes, etc … En ce moment ceux qui ont la côte pour enfiler la tenue du parfait bouc-émissaire sont les jeunes des quartiers populaires et les musulman-e-s, et pour ceux et celles qui ont la « double casquette », c’est le premier prix. 

Voir notre analyse : https://groupeantifascistelyonenvirons.wordpress.com/2020/11/03/contre-lislamophobie-unissons-nous/  

Dans une moindre mesure, la menace de l’ultra-gauche est ressortie comme un chiffon rouge (et noire) pour terroriser Mme Michu et Mr Dupont. Le ressort est classique car il fonctionne depuis toujours : pendant qu’on occupe l’espace médiatique et politique avec ces menaces qui nous guetteraient, on relègue au second plan des problématiques sociales, économiques ou sociétales plus profondes. Quand on parle de quelques centaines d’islamistes radicaux on ne parle pas de ces multinationales aux bénéfices records qui annoncent des licenciements. S’il n’est pas question ici de minorer la menace terroriste ou d’en relativiser l’ignominie des actes, il ne faut pas se laisser aveugler par l’écran de fumée qu’elle constitue.

Ainsi, derrière le miroir aux alouettes, c’est la précarité qui touchait déjà une large partie de la population qui ne cesse de grossir, les deux confinements jouant le rôle d’accélérateurs de pauvreté. On pense aux milliers de personnes à la rue, chassées par la police et à qui le gouvernement n’a pas proposé de solutions. Parmi elles, les personnes sans papiers sont les plus touchées. On peut voir le traitement inhumain et raciste réservé aux personnes migrantes par l’état et sa police. Ce harcèlement qui cible aussi les habitant-e-s des quartiers populaires n’est que le résultat d’une politique néo-coloniale raciste que n’ont jamais cessé de mener les gouvernements successifs. 

Dans ce contexte de paupérisation on peut relever qu’une des mesures phares du programme de Macron, la réforme de l’assurance-chômage, a été freinée ce mois-ci par le Conseil d’État, jugeant qu’une partie des dispositions portaient « atteinte au principe d’égalité ». La crise du Covid19 mettra des milliers de personnes au chômage dans les mois qui arrivent et accentuera la précarité déjà existante.

Crise sanitaire, réponse autoritaire

Sans sombrer dans les bassesses du complotisme ou du confusionnisme, en étant ni épidémiologistes et sans se soucier des origines réelles ou supposées de ce virus, nous ne pouvons que constater ce qui est là devant nos yeux et qui est largement suffisant pour appeler à une révolte populaire. Ici, comme dans de nombreux pays, la pandémie est l’argument massue pour la mise en place de règlementations toujours plus autoritaires socialement et libérales économiquement, toujours plus destructrices pour nos acquis sociaux et les services publics. Le pouvoir actuel souhaiterait détruire toute forme de lutte, de vie en dehors du travail et nous transformer en hommes/femmes-machines juste bons à produire toujours plus, qu’il ne s’y prendrait pas autrement.

Le comble du cynisme étant la rhétorique de la culpabilisation utilisée par le gouvernement et les différents cercles de pouvoir à grands coups de « responsabilité individuelle ». Si la Covid-19 continue de se transmettre et de tuer, la faute en revient aux jeunes, aux habitant.e.s des quartiers populaires ou aux vieux, autrement dit à des individus et à aucun moment aux choix économiques et aux réformes visant le secteur de la santé depuis 30 ans, ni aux décisions unilatérales, contradictoires et parfois lunaires de la majorité actuelle. La crise sanitaire a ouvert la voie à la mise en place de mesures de contrôle sans précédents : confinement, couvre-feu et attestations justifiant la circulation dans l’espace public. Or pandémie, ces décisions « exceptionnelles » auraient créé un tôlé. Alors encore une fois, veillons à ce que l’exception ne devienne pas la règle.  

Une répression musclée pour nous museler

Comme au moment des gilets jaunes où, dans la crainte d’une insurrection, le gouvernement décidait d’une augmentation de salaire des policiers, avec la nouvelle loi sécurité globale, Darmanin fait un cadeau à la police. Peut-être en prévision d’une révolte populaire post-COVID ?

Comment ne pas parler aussi de la militarisation des forces de l’ordre, le LBD 40 utilisé en maintien de l’ordre, les blindés de la gendarmerie en plein Paris, l’emploi systématique de l’hélicoptères, et bientôt les drones et autres cameras à reconnaissance faciale. Il est donc plus que nécessaire de maintenir la pression. La répression du mouvement social est la preuve d’un gouvernement sous pression, qui ne sait plus comment échapper à la révolte sociale.

Depuis des décennies, les violences policières dans les quartiers populaires que l’état cachait, se retrouvent aujourd’hui à la vue de tous et toutes et viennent ouvrir les yeux d’une classe moyenne paupérisée qui se retourne désormais contre un état colonialiste et autoritaire. D’autre part, on sait que les mouvements étudiants en France ont toujours été craints par les gouvernements, et bien qu’entre 2019 et 2020, dans le contexte sanitaire que l’on connait, ceux-ci soient très peu nombreux, le gouvernement souhaite quand même sortir une loi contre le blocage des universités. Avec cette loi, les étudiant-e-s risqueront jusqu’à 3 ans de prison et 45000 euros d’amende pour le blocage de leur fac lors d’une contestation sociale.

La fascisation des esprits est de plus en plus présente dans les différentes strates de notre société, et nous le répétons encore, il ne cesse de se renforcer.  La police frappe toujours plus fort, l’extrême droite met en œuvre de plus en plus d’attentats et d’exactions violentes mais pendant ce temps le gouvernement pond des lois qui restreignent nos moyens de luttes (criminalisation des mouvements étudiants, interdiction de filmer la police) et pointe du doigt les minorités. Cela fait plusieurs années que nous alertons sur les dérives fascistes de nos sociétés post-modernes, mais nous connaissons actuellement le plus gros virage autoritaire des deux dernières décennies. Nous sommes au moment d’une dérive fascisante de notre société, celui où LREM « finira par annoncer que deux et deux font cinq et il faudra le croire ». 
 
Terrorisme, virus, violence ; les peurs qu’on nous injecte sont sélectionnées. Nous ne troquerons pas nos libertés pour plus de sécurité. 

Et si vous avez du mal à vous l’imaginer, pensez à toutes ces lois votées ces dernières années, comme l’état d’urgence dans le droit commun[1], la loi anti-casseurs[2], la loi sur le séparatisme[3] et la loi sécurité globale

Maintenant imaginez tout cet arsenal législatif dans les mains d’une majorité aux orientations, de nature, autoritaires, au hasard, comme le Rassemblement National… Ouvrez les yeux, c’est le réel, vous n’êtes pas dans une dystopie. 

Unissons-nous face à un autoritarisme en marche et agissons par tous les moyens nécessaires.  
 
La dérive totalitaire n’avance plus dans l’ombre mais à grand coup d’annonces de nouvelles lois liberticides à l’assemblée.  

On ne pourra pas dire qu’on ne l’a pas vu arriver, car il arrive en klaxonnant avec 2 tons et gyrophares. 

Organisons-nous, battons-nous, reculer n’est pas une option. 

La Gale

Photo de Arthur.prrr sur instagram

[1] http://www.avocatparis.org/letat-durgence-dans-le-droit-commun-quand-lexception-devient-la-regle-au-mepris-des-libertes

[2] https://www.francetvinfo.fr/societe/loi-anti-casseurs/la-loi-anticasseurs-publiee-au-journal-officiel-entre-en-vigueur-aujourd-hui_3275517.html

[3] https://www.francetvinfo.fr/societe/religion/religion-laicite/separatisme-le-projet-de-loi-renomme-et-finalise_4186291.html

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